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  • Photo du rédacteurBenjamin Bertrand

Nirvana - In Utero (1993)

Comment parler du troisième et ultime album studio de Nirvana sans évoquer l'ascension fulgurante, l’engouement mondial pour leur album précédent NEVERMIND et la fin prématurée du groupe ? Comme ça.


IN UTERO est le meilleur album de Nirvana. NEVERMIND est un bon disque avec des chansons imparables mais trop lisse à la production. IN UTERO est plus sombre, brut et corrosif. L’atmosphère du disque est plus proche de ce que dégageait le groupe en concert. C’est d’ailleurs ce que voulait Nirvana à l’époque.


Et comme souvent avec les grands albums, le producteur a un rôle primordial. Ici, Steve Albini réussit la prouesse de capter l’essence du groupe tout en rassurant Kurt Cobain sur son travail et en permettant que le disque plaise à Nirvana et sa maison de disques. Saluons l’exploit.



La galette démarre avec « Serve the servants » qui est un des meilleurs morceaux de la courte mais brillante discographie de Nirvana. L'exemple parfait de la formule magique et enrichie par le groupe à savoir : couplet en son clair, refrain avec le pied à fond sur la pédale de distorsion. Mais si vous trouvez que le premier titre envoie du bois, laissez venir la seconde piste "Scentless apprentice", dont le beat sur-puissant et le riff de guitare ont été amenés par Dave Grohl.


D'entrée, la batterie fait du rentre-dedans. Et c’est là une différence majeure avec NEVERMIND. Ici, la rythmique est mise en avant, moins étouffée. Le futur leader des Foo Fighters est un grand batteur, au style lourd et technique, qui transpire tout au long de l’album. Kurt Cobain disait d’ailleurs que si on lui donnait le choix entre John Bonham (de feu Led Zep) et Grohl, il prendrait encore ce dernier. Bel hommage.


Chaque titre d’IN UTERO est porté par la batterie donc et les lignes de basse de Krist Novoselic, le géant et co-fondateur du groupe avec Cobain. Le chanteur et compositeur laisse (un peu) plus de place à ses comparses dans l’écriture des chansons. Le titre « Marigold » (face B de « Heart Shaped Box ») est d’ailleurs une composition de Dave Grohl. Mais ce dernier, revenant des années plus tard sur le leadership de Kurt Cobain dans les compositions de Nirvana, reconnaissait que personne d’autre n’imaginait vraiment écrire des chansons car « tout simplement, ils avaient un des meilleurs auteurs-compositeurs » derrière le micro.



Depuis l’explosion du phénomène grunge (malgré lui), Kurt Cobain jongle entre ses addictions, la presse à scandales et sa nouvelle vie de famille. Pour IN UTERO, il a donc décidé de tout mettre sur la table et de laisser les gens penser ce qu’ils veulent. Pas de plan de carrière. Juste balancer la purée et tant pis si le public de NEVERMIND n’aime pas ce nouvel album.


Des morceaux comme « Very Ape" ou « Milk it » ne sont pas là pour plaire à la ménagère. Nirvana est un groupe punk et entend bien le rester. Son leader n'est pas un guitariste virtuose et il le sait. Le groupe demandera à Pat Smear d'assurer la seconde guitare lors de la dernière tournée, pour soulager un peu Cobain. Mais ce dernier sait mieux que quiconque faire hurler sa Fender Mustang sur les refrains supersoniques. Et sa voix, plus éraillée que jamais, est toujours au service de mélodies simples et accrocheuses. Des ritournelles qui restent dans la tête, un peu comme des comptines pour enfants.


Nirvana interprète 3 titres sur le plateau de "Nulle Part Ailleurs" le 4 février 1994.


IN UTERO est moins « pop » que NEVERMIND mais certaines chansons comme « Dumb » ou « All apologies » n’auraient pas été reniées par les Beatles eux-mêmes (une des références souvent citées par Cobain).


Tout au long du disque, on navigue entre missiles punk sous acide et flèches rock enflammées. Toujours des morceaux courts. Pas de place pour les paillettes. Quelques messages sont délivrés ici ou là. Alors que certains journaux de l’époque font semblant de ne pas comprendre, « Rape me » est une chanson qui dénonce le viol. Kurt Cobain y raconte le calvaire d’une victime en décrivant ce qui se passe dans sa tête pendant que le crime est commis. A sa sortie, le morceau sera condamné par certains esprits étriqués et Cobain sera lassé de se justifier.



Même si le groupe a toujours refusé ce rôle de donneur de leçon ou de porte-parole d’une génération, Nirvana profite aussi de son succès et de sa popularité pour dire son dégoût d’une certaine « beaufitude » et d’un machisme ambiant.

En réponse à sa maison de disques un peu trop pressée de sortir le « nouveau NEVERMIND », Nirvana entend aussi contrôler tout ce qui se passe autour du disque. Y compris le visuel de la pochette (création de Kurt Cobain) et les vidéos. Le clip le plus réussi est celui de « Heart shaped box » dirigé par le maestro Anton Corbijn (encore lui). On y retrouve tous les thèmes des chansons d’IN UTERO. En vrac : les fœtus, la mort, la violence et au milieu de tout ça l’amour.


"Heart Shaped Box" et sa vidéo "Corbijniesque"


La tournée censée promouvoir l’album tourne court après une overdose de Kurt Cobain à Rome. Sommé par le groupe et ses proches de se désintoxiquer, le leader de Nirvana accepte pour échapper à ses chaperons. Avant de s'échapper pour de bon.


IN UTERO n’est clairement pas un album optimiste. Mais comme disait Leonard Cohen, "il y a une brèche en toute chose". C’est un disque punk, peut-être le dernier de l'histoire du rock. Un torrent de boue au milieu duquel certains ont trouvé quelques pierres brillantes.


A l’image des « Fab Four » de Liverpool, Nirvana a eu une carrière éclair (des premières bandes démos en 1988 au dernier concert du groupe le 1er mars 1994 à Munich). Une étreinte furtive donc. Et une fin avec un goût d’inachevé et de gâchis. Nirvana : les Beatles de la fin de siècle.



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